Dans la plupart des cultures, la fonction mélodique représente indéniablement l'un des éléments les plus fortement structurant de l'art musical. Ses incarnations sont extrêmement diverses, tout en respectant des invariants qui en définissent l'existence même. La mélodie, ou tout au moins la fonction mélodique, est repérable aussi bien à la lecture de la trace écrite de la musique (la partition), qu'à l'écoute de l'oeuvre interprétée, de la musique improvisée ou de tradition orale. Les processus de composition, d'interprétation, d'improvisation ainsi que ceux de la perception mettent en jeu cette fonction mélodique qui se déploie temporellement sur l'axe des hauteurs. Elle possède sa propre cohérence interne tout en s'articulant plus largement avec le contexte musical.
Un phénomène aussi riche et complexe place l'analyste face à un défi tout à fait passionnant. Existe-t-il des méthodes d'approche adaptées au style musical étudié ? Sinon, est-il possible d'élaborer des procédures facilitant l'appropriation et la compréhension de la fonction mélodique ? Le colloque qui s'est tenu en 2006 à Paris, et qui réunissait l'Ircam et la Sfam, se proposait de mettre en évidence cette problématique et de présenter quelques pistes à partir de l'analyse d'oeuvres issues du répertoire ancien ou contemporain. Dans son introduction, Jean-Michel Bardez positionne la question mélodique dans un contexte élargi à la dimension anthropologique. Après une approche phénoménologique de la mélodie par Albino Attilio Lanciani, les mécanismes communs à divers niveaux d'expression du processus mélodique sont abordés par Jean-Luc Leroy. L'article de Susanna Pasticci porte sur le rapport de la mélodie à la perception alors que celui de Marc Rigaudière examine les implications phraséologiques de la mélodie tonale. Un premier exemple d'analyse reste dans le contexte tonal avec l'étude des sonates pour violon seul de J. S. Bach par Yizhak Sadaï. Puis, dans la période contemporaine, Bruno Bossis montre l'organisation mélodique en fonctions cycliques dans Wagner Dream de Jonathan Harvey, Jean-Pascal Chaigne considère l'écriture mélodique dans un extrait de Terrain de Brian Ferneyhough, et Philippe Lalitte explore la totalité mélodique chez Varèse.