Dès avant le baroque, la syntaxe sonore s'est mise au diapason des sentiments. Expressive désormais, elle trouve en l'opéra, de Claudio Monteverdi à John Adams, son genre emblématique. Détaché du choeur collectif, le chanteur individuel marie le lyrisme au drame pour accomplir - dira Wagner - « des actes musicaux devenus visibles ». Ou des actes visibles devenus musicaux...
Ce B.A.-BA de l'opéra allie la réflexion à l'information. La dramaturgie lyrique et son histoire sont exposées avec précision. Près de cent synopsis résument le noyau signifiant des principales oeuvres. À partir de celles-ci, et d'autres, l'auteur s'engage dans la voie originale d'une herméneutique décryptant, sous l'angle de l'imaginaire mythique et de la psychologie des profondeurs, le message existentiel des scénarios opératiques. En tous les tons, l'Homme et la Femme y jouent leurs solidaires destinées. Cet Orphée, fils d'Apollon, qui a instauré le bel canto du chanteur enchanteur, serait-il le lointain survivant des initiatiques rituels orphiques ? Entre enfer et étoiles, un chamane, maître de l'incantatoire Langue des oiseaux ? Et son Eurydice, une figure de la Sagesse, Éternel féminin ?
« Grâce au pouvoir de la musique » mozartienne, Tamino et Pamina franchissent ensemble « la sombre nuit de la mort ». Exemplaire cheminement : si la musique a un sens, la vie en a un aussi ! « Lumière du monde » selon Puccini, l'Amour est consonance des coeurs. De sacrifices en rédemptions, de discords en accords, la mélodie des mots et l'éloquence des sons transcendent la finitude de l'humaine condition - à moins qu'elles ne se contentent, sans démériter, de divertir. L'harmonie sonore, qui est Nombre, sublime le sentiment. Chantée, la tristesse se change en joie : musicale catharsis. Sur les ailes du chant wagnérien, Tristan et Isolde s'envolent vers un béatifique nirvâna...