Ce livre est un livre de colère.
On nous casse le théâtre. On nous casse l'opéra. La mise en scène est devenue totalitaire et le metteur en scène un dictateur. Ses fantasmes (comme tout dictateur, il en est bourré) ont le devoir de s'imposer à tous ceux qui regardent comme à ceux qui jouent, mais plus particulièrement à l'oeuvre. Pourquoi ? La faute à qui ? Faut-il à tout prix transformer l'oeuvre pour lui faire dire ce qu'on veut ? A-t-on le droit d'ajouter deux scènes à Roméo et Juliette pour que Shakespeare ait (enfin !) un message politique à transmettre ? D'ajouter du sang, de l'urine, du viol et du massacre à Marivaux pour démontrer qu'il est le précurseur de Sade ? Faut-il déguiser les personnages, les habiller en complet-veston ou en sacs-poubelle pour que nous comprenions que l'oeuvre nous concerne ?
Le Paradoxe du comédien de Diderot est-il toujours vrai ? Faut-il y ajouter un Paradoxe du spectateur ? Et un Paradoxe du musicien, puisque, à mesure que le temps passe, les musiciens restituent avec de plus en plus de fidélité les chefs-d'oeuvre de l'opéra, exactement au moment où les metteurs en scène s'acharnent à les défigurer.
Mais depuis peu, le public se révolte, à l'opéra surtout. On ovationne les musiciens, on siffle les malfaisants qui polluent la scène à coups de millions d'euros. Vont-ils comprendre ? Pas sûr. Alors il faut gueuler plus fort. Le public a toujours raison.