Il n'est pas donné à tous de « sculpter l'invisible » : ce mystère exige un don de soi total. Georges Prêtre le sait, qui depuis ses débuts à Marseille a conquis les plus grandes salles, de la Scala de Milan au Met de New York. Faveur unique, il est aussi le seul Français à avoir dirigé deux fois le prestigieux concert du nouvel an. Or ce monstre sacré, aimé du public autant que des musiciens pour son instinct magnétique et son sourire inaltérable, s'est toujours considéré comme un simple « serviteur de la musique ».
Pour la première fois, l'enfant du Nord, trompettiste de jazz à douze ans, retrace les étapes d'une vie. C'est André Cluytens, à la Libération, qui distingue la fougue de cet élève de Maurice Duruflé. L'amorce d'un crescendo qui le conduira de Casablanca au Musikverein de Vienne, au gré de rencontres nommées Denise Duval, Franco Zeffirelli, Marcel Landowski, Alexis Weissenberg ou encore Herbert von Karajan, son « copain ». Sans oublier Francis Poulenc, dont il créa La Voix humaine, Gilbert Bécaud, dont il a fait connaître L'Opéra d'Aran, et bien sûr Maria Callas, à qui le liait une « osmose artistique et amicale ».
S'il n'a jamais caché son goût pour la chanson et l'opérette - comme chef et comme compositeur -, moins connues sont ses passions pour le sport, la philosophie, la politique et la « partition France ». Au fil d'une conversation intime avec sa fille, le maestro évoque aussi sa foi en l'homme et en Dieu et son art de l'interprétation, entre maîtrise et abandon.