Figure majeure de l’avant-garde musicale de la seconde moitié du 20ème siècle, Luigi Nono (1924-1990) a toujours lié son activité de compositeur à son engagement politique. « Je veux, écrivait-il en 1975, changer la conscience de mon prochain. Pour atteindre ce but, je dois me servir des moyens acoustiques de notre temps. » Pour ce « musicien-militant », changer les consciences revenait à interroger et modifier les perceptions du monde, en se portant, en tant qu’« intellectuel organique », à la rencontre d’un public que les clivages sociaux-culturels ne destinaient pas à la musique contemporaine (ouvriers, paysans), mais aussi dans la conception même de sa musique – terreau esthétique et éthique d’où il s’appliquait à faire germer, depuis les « infinis-possibles » du son et les subtilités de son écriture, les graines de multiples nouveaux mondes.
En analysant les rapports inhérents entre travail sur la perception auditive, nouvelles formes de l’écriture et dimension politique dans l’œuvre de Luigi Nono, ce livre s’attache à montrer comment le compositeur, par-delà son activité militante, s’employa à transformer le monde et à faire sourdre de nouvelles utopies à partir du laboratoire expérimental de ses compositions.