Le mot « romantique », si couramment employé aujourd'hui,
évoque dans son acception la plus répandue l'effusion
et la fièvre lyrique, dont la musique serait l'expression privilégiée.
Voilà qui surprendrait bien des musiciens du XIXe siècle.
Comment le mot « romantique », qui possédait au XVIIIe siècle
une connotation visuelle (renvoyant à la dimension pittoresque
des jardins à l'anglaise) et un sens poétique (lié aux romans de
chevalerie médiévale), a-t-il pu progressivement qualifier des
objets musicaux ? Emmanuel Reibel considère ici le romantisme
non plus comme une période, un style ou une mystérieuse essence
déterminant les oeuvres, mais comme un mot polémique et
contradictoire, témoignant d'une nouvelle façon d'entendre la
musique.
De Rousseau à Berlioz en passant par le style « troubadour », la
mode ossianique, l'engouement pour les musiques populaires
comme le « ranz des vaches », le rossinisme ou l'école « fantastique »,
cet essai explore les mutations picturales, mémorielles, nationales et
idéologiques impliquées par la «romantisation» de la musique.
L'ampleur de la documentation - partitions, traités, correspondances
de musiciens et textes littéraires - et une belle élégance
d'expression soutiennent une démonstration rigoureuse d'esthétique
historique.