«J'ai aperçu ce type, dont je n'avais pas bien saisi
le nom, alors je suis allé vers lui. Il était en train
d'essayer d'allumer une cigarette, il y avait du
vent, ses mains tremblaient ; il ne prêtait attention
à rien d'autre que l'allumette. Ma stupéfaction était
telle, que ma bouche s'est ouverte : "Vous avez
été formidable", ai-je dit. "J'ai été nul à chier", a-t-il
rétorqué sans même lever la tête.»
Au cours de l'été 1963, un jeune type à l'allure débraillée arrive, guitare à
la main, il est invité à partager la scène de Joan Baez lors d'un concert
dans un champ du New Jersey. Greil Marcus, alors âgé de 18 ans,
découvre Bob Dylan : «J'étais sidéré. J'étais décontenancé. Ce type avait
débarqué sur la scène de quelqu'un d'autre et, même si à priori rien ne
semblait le distinguer du reste du public, il y avait dans son comportement
quelque chose qui vous mettait au défi de le définir, de le cataloguer
et de l'ignorer, et c'était impossible.»
Véritable coup de foudre pour Marcus qui devient un fan de Dylan et, par
là même, un écrivain, dont le chanteur sera, pendant près d'un demisiècle,
l'un des sujets privilégiés... jusqu'à ce livre : Bob Dylan by Greil
Marcus.
On y trouve des réactions à chaud et de longs retours en arrière en quête
d'histoires inconnues, mais avant tout une volonté de s'inscrire dans la
conversation qui a toujours entouré l'oeuvre de Dylan, sa conversation
avec son public, ses chansons, les chansons des autres, et lui-même.
Convoquant John F. Kennedy et Brigitte Bardot, Charlie Chaplin et Blind
Willie McTell, Tom Paine et la «cinquième fille de la douzième nuit»,
Georgia Sam et Martin Luther King, Bill Clinton ou Barack Obama,
Bob Dylan by Greil Marcus est un livre unique sur Bob Dylan mais c'est
aussi une magnifique histoire de l'Amérique.