Issue d'une tradition plus que centenaire, la musique religieuse de langue française
manifeste, après la Révocation de l'Édit de Nantes, de nouvelles orientations. Parallèlement
aux productions parodiques et populaires, les cantiques et airs spirituels composés sur les plus
beaux recueils de poésie lyrique chrétienne, comme les Cantiques spirituels de Racine, les
Stances chrétiennes de l'abbé Testu ou les Psaumes de la pénitence d'Élisabeth-Sophie Chéron,
explorent toutes les ressources de la musique baroque française et offrent un témoignage
de civilisation et de culture aussi éloquent que les meilleures réussites des genres profanes et
religieux latins. Ces cantiques spirituels savants sont signés des plus grands noms - Michel-Richard
de Lalande, Pascal Colasse ou André Campra - mais aussi de musiciens aujourd'hui
moins connus comme Bénigne de Bacilly, Jean-Baptiste Moreau, Pierre-César Abeille ou
Antonia Bembo, qui jouèrent un rôle important dans le succès de ce répertoire.
Du fait de leur spécificité linguistique, les cantiques spirituels savants se situent
hors des canons stylistiques de la musique religieuse latine et témoignent de divers degrés
d'assimilation des modèles profanes mais également de recherches formelles très originales en
fonction de leur destination et des sensibilités religieuses qui les portent.
Loin d'être circonscrits à la maison royale Saint-Louis de Saint-Cyr, ils constituent un
divertissement dévot qui convenait aussi bien à la pratique musicale domestique qu'aux
concerts des salons aristocratiques et de la Cour. Plus largement, à travers les systèmes de
pensée esthétiques, spirituels ou idéologiques qui le modèlent et les pratiques dévotionnelles
qui le portent, le répertoire des cantiques spirituels savants ouvre un chemin étroit mais éclairant
dans la culture du XVIIe siècle.
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