Genre emblématique des arts de la scène du premier XVIIe siècle français, spectacle total alliant poésie,
musique et arts visuels, miroir d'une société aristocratique qui y met en scène de manière souvent
satirique ses préoccupations, ses passions, ses travers même, le ballet de cour reste, malgré de précieuses
études qui font toujours référence, difficile à appréhender aujourd'hui. Les traces qui nous sont parvenues,
souvent de manière fragmentaire et éparse, témoignent d'un univers fascinant, empli de références et
de symboles, alors parfaitement intelligibles, plus hermétiques aujourd'hui. Plus particulièrement, le
«ballet du roi», dansé avec magnificence chaque année au temps du Carnaval, constitue un événement
important de la vie de la cour ; le souverain lui-même s'y met en scène pour «représenter» à la cour et
à ses sujets l'image même de la majesté. Au-delà du divertissement et d'une fantaisie parfois débridée, le
«ballet du roi», qu'il soit mythologique, allégorique ou fantasque, cristallise ainsi un arsenal symbolique
au service d'un dessein politique sous-jacent.
«Ballet du roi» dansé par Louis XIII au Louvre le 11 février 1625, le Ballet des Fées des forêts de Saint-Germain
est, avec le très politique Ballet de la Délivrance de Renaud (1617), l'un des ballets du règne les
mieux conservés : sources poétiques, musicales, iconographiques, documents d'archives et mémoires
contemporains témoignent ainsi de l'éclat du spectacle, mais aussi de son importance et de sa solennité. S'il
est «ballet du roi», et donc spectacle officiel censé publier la majesté du prince, le Ballet des Fées des forêts
de Saint-Germain constitue également le premier ballet de cour à dominante burlesque : étonnant paradoxe
que ce ballet royal qui proclame ouvertement se moquer «bouffonesquement» des «ballets sérieux».
Étude de cas plus que de genre, cet ouvrage s'attache à mieux saisir les enjeux et les mécanismes de cette
apparente contradiction, en décryptant les sources plurielles de ce ballet important du règne de Louis XIII.
Réunis autour de ces Fées fantasques, historiens, historiens de l'art, de la littérature, de la danse et de
la musique invitent, à travers des analyses inédites des composantes significatives du spectacle, l'édition
de pièces documentaires remarquables et une reconstitution critique du ballet, à pénétrer dans la
«fabrique» et à saisir l'essence même de ce genre emblématique de la société de cour du XVIIe siècle.