Peut-on imaginer une manifestation sans
chansons ? Qu'il s'agisse d'entonner à
pleins poumons des hymnes au fort pouvoir
identifiant, ou de détourner des airs connus... tout
rassemblement politique connait son intermède
chantant.
Cette habitude a son histoire. Depuis les
mazarinades et la Révolution française, elle
accompagne l'irruption de la foule dans la vie de la
cité. Au 19e siècle elle prend cependant une nouvelle
ampleur. Sous l'influence de Béranger et de ses
nombreux imitateurs, les chansons commentant
l'actualité deviennent de plus en plus nombreuses
et circulent de plus en plus facilement. Les
développements de l'imprimé, des sociabilités, des
populations migrantes expliquent ces évolutions. La
parole chansonnière, perçue comme une «voix du
peuple», devient alors un enjeu politique de première importance.
Comment se forme cette culture qui ne tarde pas à revendiquer une certaine
autonomie ? Que dit-elle ? Comment se diffuse-t-elle ? Comment les autorités et
les élites peuvent-elles essayer de la domestiquer ? Ce livre propose une réflexion
sur toutes ces questions. Il permet ainsi de participer au débat sur la politisation
des populations dans la France pré-démocratique.