Par sa beauté formelle et son lyrisme, le Concerto à la
mémoire d'un ange d'Alban Berg a séduit un large public,
dès sa création. À sa charge émotionnelle - l'oeuvre est
dédiée à Manon Gropius, fille d'Alma Mahler, dont la
mort à l'âge de dix-huit ans, en 1935, frappa le Tout-Vienne
- s'est très vite superposée une légende : parce
qu'il composa son concerto sous le choc de cette mort
prématurée, et qu'il mourut soudain lui-même en décembre
de la même année, Berg aurait eu en écrivant cette oeuvre
funèbre la prémonition de sa propre fin, composant par
anticipation son requiem.
Alain Galliari démêle ici la légende et la réalité, en ouvrant
sur les derniers mois de la vie de Berg des perspectives
inédites : des informations biographiques et une observation
fine de certains détails de la partition lui permettent
de battre en brèche cette interprétation trop séduisante.
Sa réflexion, associée à une empathie profonde avec l'oeuvre
et avec ce que Berg vécut intérieurement au long de sa
dernière année de vie, révèle des prolongements bien plus
riches, qui nous font mieux comprendre le bouleversement
que le Concerto à la mémoire d'un ange ne cesse d'engendrer
chez ses auditeurs.