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Mon goût pour Schehadé remonte à mon plus jeune âge. Une de mes tantes, au poète, servait de secrétaire, et nous lisions ensemble à voix haute (elle avec dévotion, moi dans le balbutiement) les chanson-nettes des Violettes, qu’elle tapait à la machine au fond de longs après-midi soyeux. Je me souviens aussi que nous déclamions quelquefois la table des matières des Poésies, composée de leurs incipits, et que nous trouvions que le poème ainsi formé ne déparait pas les autres, et peut-être même qu’il les dépassait, en gratuité, en naïveté, innocent comme les oracles, à jamais indéchiffrable…
Ai-je voulu dire que ces textes – cette poignée de textes, car l’ensemble ne forme qu’un mince volume – ne sont que des actes gratuits ? On m’aura mal compris. Mais ils sont oraculaires, de toute évidence, ils imposent leur vérité désarmante, leur enfantine simplicité, sous les dehors du fantasque, de l’inattendu, parfois de l’énigme. L’enfant, d’ailleurs, et l’enfance y sont le tout pour le tout ; je n’ai presque pas forcé cet air de famille dans les « poésies » que j’ai choisies (Schehadé préférait ce mot, vieillot ou quelque peu provincial, à celui de « poèmes »), et qui suivent le même fil.
« D’abord derrière les roses il n’y a pas de singes : il y a un enfant » : tels sont les premiers mots du livre, et les premiers que par un accord immédiat j’ai voulu mettre en musique. Sans doute ne m’auraient-ils pas percé de la même flèche s’ils ne continuaient pas ainsi : « un enfant qui a les yeux tourmentés ». Ce tourment fait bon ménage avec le bonheur ; et mon premier cahier ne veut rien exprimer d’autre que cette certitude des jours heureux, à jamais enfuis. Si le second est plus grave, et presque sombre, c’est qu’aux images d’une enfance bénie viennent se mêler celles de l’exil, et qu’à dix années de distance (une éternité !) la plume tremble autant que le cœur, lequel ne cessera plus, désormais, de compter les années à rebours…
Je veux redire ici, par précaution, et plus fort encore, ce que je disais à propos de mes cahiers d’Éventails d’après Claudel : les cycles doivent garder leur intégrité, et l’on se gardera de mélanger des mélodies d’époque – et de nature – différente.
Guy Sacre
15.10
Ils ne savent pas Ô mon amour Quand l'oiseau se déchire
DANS LE MÊME RAYON ET SOUVENT ACHETÉ AVEC 3 POÉSIES DE GEORGES SCHEHADÉ :
GUY SACRE
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